Court de Gébelin

érudit protestant et franc-maçon

Antoine Court de Gébelin (vers 1720/5-1784) est un érudit protestant et franc-maçon. Très connu de son vivant il est maintenant plutôt oublié. On peut toutefois découvrir sa vie et son œuvre dans quelques dictionnaires et encyclopédies dont récemment Le Monde maçonnique des Lumières, dictionnaire prosopographique édité en 2013 chez Honoré Champion.

Ce personnage illustre notre loge non seulement par son nom qui en est le titre distinctif mais aussi par les thèmes que nous comptons étudier : christianisme, ésotérisme et franc-maçonnerie.

1. Christianisme

Court de Gébelin est un fils de pasteur. Ce dernier, originaire des Cévennes, avait choisi l’exil en Suisse après la proclamation de l’Edit de Fontainebleau révoquant en 1685 l’Edit de Nantes plutôt que de renier sa foi. Agissant clandestinement, il est considéré comme le restaurateur du protestantisme en France. Antoine Court de Gébelin fut pasteur lui-même et succédera à son père, en 1760, comme correspondant général des églises de France.

2. Esotérisme

Court de Gébelin est un érudit maîtrisant plusieurs langues vivantes et mortes. Son grand ‘œuvre, le Monde primitif, bien reçu par les encyclopédistes, est consacré à la recherche de la langue primitive dont la possession pourrait, selon lui, permettre une connaissance vraie et profonde de la nature réelle du monde. Cette thématique, dans l’air du temps, l’amènera, à s’intéresser aux images et aux symboles et notamment au tarot. En donnant aux cartes des significations reposant sur les images entendues comme médiations établissant des correspondances diverses et variées, il s’inscrit dans ce vaste ensemble des courants ésotériques modernes définis magistralement par Antoine Faivre. Cette somme, écrit ce dernier, est «une des premières tentatives pour trouver par l’exploration des diverses traditions connues, quelque chose qui ressemble à ce qu’on appellera plus tard la Tradition primordiale‘».

3. Franc-maçonnerie

Court de Gébelin fut membre de 3 loges : Loge Mère Ecossaise du Contrat Social ; Les Neuf Sœurs (avec Benjamin Franklin, Joseph Jérôme Lefrançois de Lalande, Voltaire) ; Les Amis Réunis. Cette dernière loge fut à l’origine des fameux convents des Philalèthes (1785-7) où se développèrent des spéculations mystico-ésotériques. Il échangea aussi avec Louis-Claude de Saint-Martin.

Au total ce personnage complexe, contradictoire, baroque nous est apparu comme le héros idéal éponyme de notre loge.

ÉSOTÉRISME MAÇONNIQUE ET TRADITION CHRÉTIENNE

Voilà un programme de travail qui semble inattendu, et certainement délicat, dans une loge maçonnique tant la Franc-maçonnerie française d’aujourd’hui continue à avoir de grandes difficultés à aborder sereinement, et à étudier, les questions qui touchent à la religion. Si l’Eglise catholique romaine a une grande part de responsabilité dans ses mauvais rapports avec la Franc-maçonnerie en la condamnant régulièrement depuis 1738, la franc-maçonnerie française elle-même n’a pas contribué à calmer les choses en adoptant, au rebours de sa tradition, des positions anticléricales affirmées depuis le fameux convent de 1877. Ce contexte hautement polémique nous pose, comme franc-maçon, un problème méthodologique : une loge maçonnique est-elle le lieu adéquat pour étudier les rapports de la religion avec la Franc-maçonnerie attendu que nous sommes inévitablement juge et partie ? C’est ici que le concept de loge d’études et de recherches apparaît comme particulièrement approprié puisque c’est d’abord et avant tout comme chercheur ayant l’obligation et le devoir de suivre la méthode purement académique que nous étudierons ces problèmes : Quels sont les rapports entre religion et Franc-maçonnerie ?

Au XVIIIe siècle, les condamnations papales de la Franc-maçonnerie –mais les catholiques ne seront pas les seuls- s’appuient sur plusieurs arguments.

1. Le secret

Le « secret » maçonnique inquiète. On croit y voir le besoin de cacher des activités néfastes contre la religion en général et l’institution romaine ou autre en particulier.

2. Le latitudinarisme

A cet argument politique s’ajoute un argument théologique : la Franc-maçonnerie favoriserait le latitudinarisme. Elle s’accorderait ainsi des libertés dans les principes dogmatiques catholiques ou autres. Mais outre le fait qu’on ne voit pas que la Franc-maçonnerie ait, en tant qu’institution, jamais pris position sur quelques dogmes religieux que ce soit, ce qui est expressément interdit par les Constitutions, l’Ordre maçonnique est, dans son principe, incontestablement respectueux des pouvoirs politiques et religieux en place. D’un autre côté, la Franc-maçonnerie ne se montre pas indifférente en matière religieuse puisque son symbolisme est largement informé de christianisme jusqu’à favoriser l’apparition de grades comme celui de Rose-Croix. Mais ceci est à double tranchant : certains, ignorants à n’en pas douter, apparentent ces grades à des sacrements, et veulent y voir une sorte de blasphème voire de profanation jusqu’à rendre incompatible religion chrétienne et Franc-maçonnerie.

3. L’ésotérisme

Nombre d’institutions religieuses reprochent à la franc-maçonnerie son « ésotérisme » dont, à vrai dire, elles ont une idée très sommaire associée à la notion péjorative de secte et à l’opposition simpliste exotérisme-ésotérisme. Cette conception de l’ésotérisme est bien loin de la définition académique rappelée plus haut. En réalité l’ésotérisme est une langue de signes et de symboles –dont le symbolisme maçonnique est un des exemples- qui est un regard sur le monde (pour reprendre la belle expression de Jean-Pierre Laurent). En d’autres termes il n’y a pas d’ésotérisme en soi, maçonnique ou non. L’ésotérisme, ce sont des courants de pensées diverses et variées à travers l’histoire, les cultures et spiritualités y afférentes du monde occidental et qui répondent à 4 critères : les correspondances ; la nature vivante ; le rôle des médiations et de l’imagination ; l’expérience de la transmutation ou seconde naissance.

Bref, on l’a compris, les rapports entre religion et franc-maçonnerie moderne sont complexes d’autant qu’ils naissent en un siècle, le XVIIIe, qui ébranle les fondements du christianisme. Dans ce contexte critique, la franc-maçonnerie a pu apparaître comme une tentative de refondation spirituelle en général et du christianisme en particulier. Songeons à la notion de « christianisme originel » développée par Joseph de Maistre et Louis Claude de Saint-Martin. Et tout cela dans une atmosphère effervescente de recherches spirituelles : le pur amour de Mme Guyon qui a pu inspirer Ramsay ; le piétisme allemand ; l’idée d’église intérieure qui s’affranchit de tout appareil clérical et qui développent les concepts de « prière du cœur » et de « voie cardiaque »; la théurgie d’un Martinès de Pasqually ; le swedenborgisme ; le mesmérisme etc. D’une certaine manière la franc-maçonnerie s’inscrit aux confluents de tous ces courants.

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